Quand la France fait ce qu'elle veut de la convention franco marocaine du 10 août 1981

Quand la France fait ce qu'elle veut de la convention franco marocaine du 10 août 1981

Publié le : 20/03/2014 20 mars mars 03 2014

Si la France a ses raisons pour repousser l'application du droit du divorce marocain, on se demande pourquoi elle a signé, ou en tout cas maintenu une convention indiquant le contraire, le droit international, et le droit tout court d'ailleurs, n'étant a priori pas fait pour changer d'avis quand on veut.

Comme l'observe fort justement Noémie Houchet Tran (Divorce franco marocain et inefficacité de  la convention bilatérale), la convention franco marocaine relative au statut des personnes et de la famille garde vocation à s'appliquer, et pourtant, « force est de constater que l'exception d'ordre public est aujourd'hui devenue la norme et que la convention est très souvent écartée par les juridictions ».

Théoriquement, si un juge français est saisi, il devra appliquer : le Code de la famille marocain si les deux époux sont marocains, le Code civil français si au moins un des époux est français.

En réalité, le juge français va rarement appliquer le droit marocain, celui ci continuant à prévoir quelques types d'action en divorce différents selon que c'est l'homme ou la femme qui en est à l'origine, ce qui est mal accueilli par le juge français, lequel analyse l'égalité homme-femme par type d'action en divorce et non sur la globalité du droit national en cause.

Il aura l'occasion de le faire dans plusieurs situations différentes : exécution forcée en France d'un jugement de divorce marocain (qui nécessite un exequatur difficile à obtenir), transcription en France d'un jugement de divorce marocain (le Procureur de la République de Nantes oblige également les parties à obtenir un exequatur, alors même que l'article 14 de la convention indique que les jugements de divorce peuvent être publiés sans exequatur sur les registres de l'état civil), et bien sûr opposition à l'introduction en France d'une procédure déjà introduite au Maroc.

Et là, petite spécificité de cette convention qui, elle au moins, est appliquée, alors que ce n'est pas la meilleure : l'article 11 invite le juge secondairement saisi à ne pas prendre sa décision (se dessaisir, ou continuer sans égard pour le 1er juge saisi), mais à surseoir à statuer dans l'attente du jugement du 1er juge saisi. « Pourquoi attendre le prononcé d'une décision qu'on ne reconnaîtra pas ? » interroge l'auteur de l'article. Cela ne fait que retarder l'issue du procès.

Elle conclue donc par ce conseil adressé aux couples mixtes ou marocains résidant en France : préférez divorcer en France. Ce qu'un avocat français ne saurait évidemment que vous encourager à faire...

Echelle de ludique (1) à technique (5) : 3

Historique

  • Quand la France fait ce qu'elle veut de la convention franco marocaine du 10 août 1981
    Publié le : 20/03/2014 20 mars mars 03 2014
    Droit de la famille
    Quand la France fait ce qu'elle veut de la convention franco marocaine du 10 août 1981
    Si la France a ses raisons pour repousser l'application du droit du divorce marocain, on se demande pourquoi elle a signé, ou en tout cas maintenu une convention indiquant le contraire, le droit international, et le droit tout court d'ailleurs, n'étant a priori pas fait pour changer d'avis quand...
  • Salut l’artiste
    Publié le : 04/03/2014 04 mars mars 03 2014
    Droit de la famille
    Salut l’artiste
    Êtes-vous divorcé quand votre époux décède en cours de délibéré ? Il était dit que ce dossier serait vraiment particulier. Après avoir guerroyé (voir actualité du 4 février 2010) pour obtenir une pension devant la Cour en appel de l’ONC, nous revenions devant elle, cette fois en appel du ju...
  • Du choix pas si évident entre les différentes procédures d’urgence familiale
    Publié le : 18/02/2014 18 février févr. 02 2014
    Droit de la famille
    Du choix pas si évident entre les différentes procédures d’urgence familiale
    A propos du problème du domicile conjugal entre concubins En situation de violences conjugales, a priori, il n’y a pas photo, entre les différentes procédures d’urgence. Surtout en matière de logement entre concubins, où là, c’est le tout ou rien. D’un côté, le référé « classique », dans...
  • Comment organiser son droit de visite et d’hébergement à l’autre bout du monde
    Publié le : 06/02/2014 06 février févr. 02 2014
    Droit de la famille
    Comment organiser son droit de visite et d’hébergement à l’autre bout du monde
    Le père résidant au Canada et n’ayant pas vu son enfant depuis 2 ans peut tout de même obtenir un jugement l’autorisant à le voir pendant les vacances, dès lors qu’il ne s’est pas désintéressé de la question. Pour une fois, je n’ai pas vu le client en vrai. Jamais. Même pas à l’audience. Il faut...
  • Le petit jeu de la provocation entre policiers et jeunes
    Publié le : 04/02/2014 04 février févr. 02 2014
    Droit pénal
    Le petit jeu de la provocation entre policiers et jeunes
    Il est essentiel d’essayer de reconstituer minutieusement les faits ayant abouti à une procédure pour outrage. Les policiers sont des malins. Globalement, c’est heureux, pour le citoyen qu’ils protègent. Mais parfois, il faut faire attention à la façon dont ils utilisent leurs ficelles. Mon...
  • Le principe d'égalité comme dernier rempart à la répudiation en France
    Publié le : 10/01/2014 10 janvier janv. 01 2014
    Droit de la famille
    Le principe d'égalité comme dernier rempart à la répudiation en France
    La course au divorce dans les couples maghrébins venus vivre en France relève parfois de la fable du lièvre et de la tortue que connaissent bien les praticiens en droit de la famille : l'époux se hâte d'obtenir rapidement un divorce par répudiation au pays, mais l'épouse y met échec en obtenant l...
  • « Arrêtez de nous saoûler avec la Table de référence pour la fixation des pensions alimentaires ! »
    Publié le : 15/12/2013 15 décembre déc. 12 2013
    Droit de la famille
    « Arrêtez de nous saoûler avec la Table de référence pour la fixation des pensions alimentaires ! »
    Ce cri du coeur, entendu dans les couloirs du Palais (authentique, je ne dirai pas de qui il vient), tout juge a eu envie de le dire au moins une fois à un avocat, et tout avocat à son client. La Cour de cassation vient de s’en charger (Civ 1, 23 oct 2013, n° 12-25301).   Le message est a...
  • De l’articulation entre les différents types de divorce contentieux
    Publié le : 01/11/2013 01 novembre nov. 11 2013
    Droit de la famille
    De l’articulation entre les différents types de divorce contentieux
    La Cour de cassation atténue la pression sur le choix initial du fondement de la demande en divorce. C’est une gymnastique typique de procédurier, et on comprend mieux pourquoi l’avocat est obligatoire dans la seconde phase du divorce contentieux. On rappelle que lorsqu’on introduit cette...
  • Du risque de « trop bien » négocier en CRPC avec le Procureur
    Publié le : 21/10/2013 21 octobre oct. 10 2013
    Droit pénal
    Du risque de « trop bien » négocier en CRPC avec le Procureur
    Quand le juge homologateur rappelle qu’il n’est pas une caisse enregistreuse. On le sait, la CRPC comporte deux phases, qui rythment la demi-journée consacrée à cette procédure (ou journée, selon le tribunal concerné). Par exemple, à Bobigny, en première partie de matinée, c’est le moment...
<< < ... 3 4 5 6 7 8 9 ... > >>