Amélioration civile et surtout pénale de la lutte contre les violences conjugales
Publié le :
05/10/2014
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La loi n° 2014-873 du 4 août 2014 ne vise pas une révolution, mais contient des dispositions techniques, d'importance diverse.
Sur le plan civil, elles confirment la place de l'ordonnance de protection.
Au niveau du champ d'application, le danger, critère d'intervention de cette procédure, est celui auquel sont exposés, non seulement le conjoint victime, mais aussi "un ou plusieurs enfants"; cela permet de considérer toutes les manifestations des violences conjugales, y compris au travers de leur effet sur les enfants.
Au niveau de la rapidité, il est indiqué que cette ordonnance est rendue "dans les meilleurs délais", ce qui n'ajoute guère à la pratique existante. Etant donné déjà sa relative rapidité, le seul palier qui restait à franchir aurait été de chiffrer le nombre de jours; c'était d'ailleurs le projet initial, qui visait 24 à 48 h, mais cela a été considéré comme trop ambitieux.
Au niveau de l'attribution du logement familial au conjoint victime, il est précisé que c'est le principe "même s'il a bénéficié d'un hébergement d'urgence", afin d'éviter que ce conjoint, en recourant à ces solutions immédiates, ne craigne d'être pénalisé dans sa demande d'attribution du logement familial.
Au niveau de la durée des mesures, c'est une des principales innovations : elle est portée de 4 à 6 mois, et sa possibilité de prolongation qui existait déjà pour les couples mariés (si dans ce délai ils déposaient une requête en divorce), est étendue aux couples non mariés, s'ils déposent une requête relative à l'exercice de l'autorité parentale (dite "hors divorce"). Reste la situation du conjoint victime non marié et sans enfant...
Au niveau du mariage forcé, à l'article 202-1 alinéa 1er du Code civil, qui dispose que les conditions de validité du mariage sont régies, pour chacun des époux, par sa loi personnelle, il est ajouté que "quelle que soit la loi personnelle applicable, le mariage requiert le consentement".
Cette loi contient aussi des dispositions pénales.
L'article 222-16 du CP qui ne concernait que les "appels téléphoniques" malveillants concerne désormais aussi les messages "électroniques" (SMS, courriels...). La jurisprudence l'avait déjà fait, mais c'est vrai que ça devenait indispensable de le reconnaître.
La pratique avait déjà inventé également les stages "de responsabilisation" des auteurs de violences conjugales, que ce soit dans un cadre pré ou post sentenciel, avant que cette loi ne les reconnaisse, mais je ne suis pas un grand adepte de ces mises en scènes à la fois infantilisantes, inutiles (un peu comme les obligations de soins psychologiques, ou les médiations forcées), et utilisées par la justice principalement pour se décharger de sa mission sur d'autres "spécialistes" (en général, assez nuls).
Au moins, le recours à la médiation pénale en cas de violence conjugale, est désormais limité à des conditions (notamment que la victime en fasse la demande...). Il aurait carrément pu être écarté.
Bien plus concret : le juge pénal doit se prononcer sur le maintien ou le retrait de l'autorité parentale lorsqu'il condamne un crime ou un délit d'atteinte à la vie, à l'intégrité physique, de viol, d'agression sexuelle ou de harcèlement, commis par un parent sur son enfant ou l'autre parent (articles 221-5-5 et 222-48-2 CP).
Très concret également : dans le cadre d'une alternative aux poursuites, d'une composition pénale, d'un contrôle judiciaire ou d'un sursis avec mise à l'épreuve, l'auteur des violences conjugales devra presque automatiquement résider hors du logement familial lorsque la victime le demandera. Certes, la loi inclue une condition supplémentaire de risque de réitération, mais on peut penser qu'il s'agit d'une prudence qui n'empêchera pas grand chose en pratique.
La mesure pénale emblématique de la loi est la consécration législative, dans un nouvel article 41-3-1 CP, d'un "dispositif de télé protection" (le "téléphone grand danger") déjà imaginé par la pratique des Parquets, dans les situations où il y a un "grave danger", l'accord de la victime, l'absence de cohabitation, et une interdiction judiciaire de contact.
Echelle de ludique (1) à technique (5) : 3
Historique
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